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Concours – instrument vivant de la culture du bâti – werk, edition

Les concours sont un espace de liberté

Pour l’architecte zurichois Mike Guyer, le concours d’architecture est un contrat social jouissant d’une large reconnaissance. Le fait qu’un concours façonne un espace de vie pour une longue période justifie une évaluation précise de la qualité. Il convient toutefois de prendre soin de ce système qui fonctionne bien. Interviewé par Ludovica Molo et Caspar Schärer, Mike Guyer se montre modérément confiant dans l’avenir : face aux défis qui
nous attendent, il faudrait fixer les bonnes priorités pour chaque projet.

Mike Guyer, Ludovica Molo, Caspar SchärerCommander la publication

Caspar Schärer (CS) Mike Guyer, quelle place les concours occupent-ils dans le cabinet d’archi-tectes Gigon / Guyer ?

Mike Guyer (MG) Ils sont extrêmement importants : d’une part, pour évoluer sur le plan des contenus en architecture et, bien sûr, pour obtenir des commandes. Les concours sont pour nous un espace de li-berté dans lequel nous pouvons expérimenter certaines thématiques, les explorer et les développer au fil de plusieurs projets. Ils impliquent la recherche d’un équilibre entre l’expérimentation et l’adéquation. Les concours nous placent dans un état permanent de tension créative, de recherche et d’apprentissage.

Ludovica Molo (LM) À combien de concours avez-vous participé jusqu’à présent ?

MG Au cours des 35 dernières années, à environ 255 concours. Nous en avons gagné 51 et remporté environ 80 prix. Si les années 1990 et 2000 ont été riches en succès, nous avons ensuite connu une al-ternance de périodes plus ou moins fastes. En moyenne, nous participons à près de 6 à 12 concours par an. Ce volume dépend de l’ampleur des procédures et du nombre d’étapes de traitement par lesquelles nous devons passer.

CS Qu’est-ce que cela veut dire financièrement de travailler sur 6 à 12 concours par an ?

MG Aujourd’hui, il nous faut environ 1400 heures pour un concours, mais, pour les grandes procé-dures, cela peut aller jusqu’au double. Cela signifie qu’avec 4 à 6 architectes, nous investissons environ 12’000 heures par an, ce qui est beaucoup pour un bureau de 30 personnes.

Volker Bienert, architecte à Zurich, aime photographier les lieux dans lesquels les projets de concours sont exposés pour le public. Les photos des expositions dans des salles de sport, des foyers, des caves, des bâtiments industriels dépouillés et des étages de bureau montrent un échantillon de cadres de la vie quotidienne en Suisse alémanique.
Exposition du concours Extension et rénovation ou remplacement de l’école Martin Haffter, Weinfelden, TG (concours ouvert, 2017, 56 participations)

LM Est-ce pour un concours que votre cabinet a été créé ? C’est vrai que c’est souvent une raison pour s’associer durablement.

MG Nous avons tous les deux fait nos études à l’EPF et obtenu notre diplôme sous la direction de Dolf Schneebeli. Annette est restée en Suisse et a notamment travaillé chez Herzog & de Meuron, tandis que moi, j’ai passé trois ans à Rotterdam au sein du bureau OMA. C’est en Hollande que j’ai commencé à participer à des concours. De retour à Zurich, j’ai fait partie d’un atelier collectif sur le site Steinfels du quartier Zurich-West et nous avons participé à des concours dans différentes constellations. C’est après avoir remporté le concours pour le musée Kirchner de Davos, qu’Annette et moi avions présenté ensemble, que nous avons créé le bureau, en 1989.

CS Tu connaissais déjà l’univers des concours, en tant que fils de deux architectes...

MG Dans ma jeunesse, j’ai pu observer mes parents esquisser les grandes lignes d’un concours en l’espace d’un week-end et assurer la mise au point du projet au bureau durant les deux semaines suivantes. Les bâtiments étaient de la même taille qu’aujourd’hui, mais les exigences étaient nettement moins élevées, de sorte que la somme de travail était moins importante.

LM Manifestement, c’est l’idée qui était décisive…

MG Oui, on se concentrait principalement sur une idée urbanistique et architecturale, sur la manière de transposer l’aménagement spatial demandé dans un endroit donné. Les plans étaient dessinés à la main, les documents remis étaient plus personnels et souvent plus artistiques – rien que les perspectives en grand format étaient parfois très impressionnantes.

LM Après toutes ces années, quel regard portes-tu sur le concours d’architecture ?

MG Bien que le système du concours soit parfois frustrant et fatigant, surtout pendant les périodes où l’on ne gagne rien, je considère que c’est un privilège de pouvoir élaborer des projets dans le cadre de concours pour les grands ouvrages de construction de notre époque. Dans d’autres pays européens, ces possibilités n’existent pas dans la même mesure. Le concours représente un investissement, mais il donne aussi la liberté de pouvoir élaborer pendant un certain temps un projet de manière intensive et sans être dérangé. Souvent, des thématiques se développent sur plusieurs projets et les solutions de-viennent plus variées et plus raffinées. Les concours reflètent les sujets qui occupent le présent et font parfois émerger des réponses étonnantes aux défis de notre époque.

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