Elle ne peut plus aujourd'hui faire l'impasse sur le passé architectural récent, que la collectivité n'a jusqu'à présent pas jugé digne d'être protégé. Dans les seules villes, 60 % des volumes bâtis ont été édifiés dans la deuxième moitié du XXe siècle. Il se trouve parmi eux de nombreux représentants du modernisme d'après-guerre, qui commencent toutefois à prendre de l'âge. Dans les cantons, l'établissement des inventaires de ces édifices n'est pas défini de manière homogène et présente différents degrés d'avancement. À une époque de tournant des politiques énergétiques, ces bâtiments construits avant la crise du pétrole sont fortement menacés. Comment préserver ces édifices avec un bilan énergétique raisonnable? Comment faire devant leur si grand nombre?
Pour les autorités, les promoteurs et les mandataires impliqués, il est temps de trouver une nouvelle pratique. Pour nous architectes, cette pratique englobe dans la réalité bien plus que la protection de la substance des constructions, telle que la conservation du patrimoine la définit comme objectif principal. L'idée architectonique à la base des ouvrages de même qu'une reprogrammation utile et viable pour l'avenir en font tout autant partie à importance égale. On cherche à préserver l'intégrité des bâtiments à protéger. Pour cela, il faut des exemples de réussite. Avec le Laboratoire des Techniques et de la Sauvegarde de l'Architecture Moderne TSAM (EPFL), la Suisse romande dispose d'une institution professionnelle ancrée dans le paysage universitaire, qui a déjà participé à une gamme impressionnante de restaurations de bâtiments menacés datant de l'époque moderne. En Suisse allemande, on ne dispose de rien de comparable à ce jour.
Quelle que soit l'importance et la nécessité de la tâche d'inventaire : une résistance politique s'y oppose un peu partout. Celle-ci est dirigée d'une part contre le nombre croissant d’éléments d'inventaire considérés comme dignes de protection, il s'agit parfois de quartiers entiers. Mais souvent, cette résistance de la politique a un caractère fondamental, elle se présente comme une déclaration de guerre à la culture de la préservation, qui est surtout comprise comme une restriction des droits liés à la propriété. Comment pouvons-nous – autorités et mandataires – faire face ensemble à cette résistance croissante? Les interventions de nos invités donnent des éclaircissements sur des problèmes spécifiques et sur le combat politique. Mais ils montrent également des exemples encourageants de coopération et de développement de solutions viables pour l'avenir.